This article examines the implementation and the spreading of a quality regulation system on fertilizers - in particular those stemming from recycling - in nineteenth-century France, in connexion with the question of their impact on the environment. In a first part I discuss the crucial role of chemists-agronomists in the establishment of a “science of fertilizers”. Practices gradually developed by chemical experts underpinned the establishment of official methods as sanctioned by the law of 7 April, 1888 on the repression of fraud in the trade of fertilizers. The fast technical evolution and methodological uncertainties of the chemical analyses were periodically criticized by some agronomists. Institutional laboratories were soon organized and were crucial in the establishment of a new general law on the repression of fraud on 1 August, 1905 which took into account the evolutionary character of analytical methods. In a second part, I examine the implementation of this “science-based fertilizers” within the agricultural world. First of all, the role of educational institutions is analyzed. Elementary and secondary school teachers proved crucial as intermediators, providing a simplified version of agricultural science which incorporated the traditional know-how of farmers. This strategy of mass propaganda was also framed in an emerging policy of regulating unhealthy establishments. Secondly, I will concentrate on the management of hazards related to fertilizers. Those fertilizers stemming from recycling were especially dangerous and could damage the health of both farmers and domestic animals. Fertilizers’ toxic effects were observed from the very beginning of their use. Physicians and toxicologists periodically reported accidents. They alerted farmers and sometimes took preventive measures. The pollution of groundwater by the spread of human fertilizers even was at the origins of the introduction of the word “pollution” in French legislation through the law of 15 February, 1902 relative to the protection of public health.
Cet article examine la mise en place et de la diffusion d’un système de régulation de la qualité des engrais - en particulier ceux issus du recyclage - en France au dixneuvième siècle et de leur impact sur l’environnement. Une première partie aborde le rôle crucial des chimistes agronomes dans l’établissement d’une “science des engrais”. Cette évolution se fonde sur les bonnes pratiques établies par les experts chimistes et qui serviront à l’établissement des méthodes officielles reconnues par la loi du 7 avril 1888 sur la répression des fraudes dans le commerce des engrais. L’évolution rapide des techniques et l’incertitude de certaines méthodes sont régulièrement dénoncées par les agronomes et les experts chimistes. Des laboratoires institutionnels sont organisés et leur rôle sera crucial dans l’établissement de la loi du 1er août 1905 sur la répression des fraudes qui prend acte du caractère évolutif des méthodes analytiques. Dans une seconde partie, j’examine les moyens adoptés par les agronomes et l’État dans la propagation des engrais auprès du monde agricole. J’aborde d’abord le rôle des institutions d’enseignement dans la diffusion de la “science des engrais”. Différents vulgarisateurs et professeurs au niveau secondaire et élémentaire adoptent une pédagogie fondée sur une grande simplification des phénomènes agricoles tout en ménageant le savoir-faire des agriculteurs. Cette stratégie de diffusion de masse s’inscrit également dans le cadre d’une politique de régulation des établissements insalubres. Les engrais, notamment ceux issus du recyclage, peuvent nuire à la santé des agriculteurs et à celle de la population. Les effets toxiques des engrais ont été observés dès le début de leur utilisation. Chimistes, médecins et toxicologues alertent périodiquement les agriculteurs sur les dangers liés à la manipulation de certains engrais et proposent divers conseils de prévention. La pollution des nappes phréatiques par l’épandage des engrais humains est à l’origine de l’introduction mot “pollution” dans la législation française à travers la loi du 15 février 1902 relative à la protection de la santé publique.